#JMPS – Témoignage. Le courage de vivre de Caroline. 7 questions clé.

A l’occasion de la Journée Mondiale de la Prévention du Suicide, rencontre avec Caroline en France pour sept questions clé. Victime d’inceste, pratiquant l’automutilation, idées, crises suicidaires puis passage à l’acte, hospitalisée pour tentatives de suicide à l’âge de 15 ans, aujourd’hui, la jeune femme est une survivante qui a laissé les années noires derrière elle. Caroline s’est engagée en Médecine (elle est en master) et œuvre pour la prévention du suicide. Un témoignage vibrant d’un engagement pour la vie.

1.

Ut Fortis : Bonjour Caroline, tu es passée par un chemin que beaucoup de personnes considèrent difficile. Comme te perçois-tu aujourd’hui, juste à ce moment précis ?

Caroline : Je me perçois comme une fille courageuse certes, aussi très fière de moi, de mon parcours et de ce que je suis devenue. Car je me suis faite détruire quand j’étais jeune et maintenant je suis des études qui figurent parmi l’une des plus dures de France. Oui, je me perçois comme une fille forte et courageuse et surtout, je suis très fière de moi !!

2.

U. F. : Si tu avais un conseil à donner à une jeune fille de 15 ans, victime de violences et du silence, qui s’automutile, que lui dirais-tu ?

C. : Je lui dirais qu’il faut qu’elle en parle à une personne, même si c’est dur, il faut en parler. De plus, l’automutilation semble te soulager mais demain te fera complexer car tu auras ces marques à vie qui te rappelleront cette période toute ta vie. Donc arrête, s’il te plait ! Plus tard cette décision t’aidera quand beaucoup de personnes te jugeront en te réduisant à tes automutilations, donc fais les taire dans le présent et arrête !

Voir l’article sur les automutilations : Réduire la pression autrement que par les dépendances. Focus sur l’automutilation.

3.

U.F. : Y-a-t-il eu un moment précis dans le passé où tu as choisi de vivre (tel un déclic) ou bien cela a-t-il été une plus longue construction sans un repère fixe ?

C. : Cela a été une longue construction, je me suis accroché à mes études en me disant que c’est cela qui va m’aider ! De plus, mon petit ami m’a beaucoup soutenu à l’époque. Pendant cette période, il faut être soutenu et mettre un cadre.

4.

U.F. : Comment fais-tu face aujourd’hui à l’angoisse, la peur ou l’échec ? Comment gères-tu l’euphorie ?

C. : J’ai très peur de l’échec surtout dans mes études car c’est cela qui m’a tenu à la surface quand j’étais au plus bas. L’angoisse maintenant ça va, avant, c’était beaucoup de cauchemars, de crises d’angoisses maintenant je suis bien avec moi-même. L’euphorie je l’accepte avec joie, la moindre petite joie, il faut l’accepter. Je me disais avant, bah il ne faut pas car cela ne durera pas, mais maintenant je ne pense plus ainsi.

5.

U.F. : Pourquoi as-tu décidé de t’engager dans la prévention du suicide ? Ne la pratiques-tu pas
déjà au quotidien, étant dans le secteur de la médecine ?

C. : D’une part, je sais que je n’avais pas conscience qu’il existait une telle prévention et je pense que les personnes qui veulent passer à l’acte doivent avoir conscience qu’elle existe, que personne n’est seul. Maintenant avec la médecine, je pratique la prévention au quotidien et pour mon plus grand plaisir, mais je voulais vraiment qu’il y ait un peu plus d’engagement dans ma vie car je suis déjà passée par cette phase, moi-même ayant été touchée. D’autre part, c’est un sujet tabou et je pense qu’en parler permettrait de lutter contre ce tabou.

6.

U.F. : Caroline, le terme de « survivant » est donné aux personnes qui ont ton profil. Le penses-tu
approprié ?

C. : Je trouve que ce terme est approprié. En effet, on est des survivants, on doit encore se battre et on doit survivre pour trouver le bonheur et retrouver une pérennité.

7.

U.F. : Y-a-t-il un message que tu aimerais adresser à l’intention des familles et des proches de
ceux qui traversent ou qui ont traversé une crise suicidaire ?

C : Oui, qu’il ne faut pas juger ces personnes et ne pas les incriminer car ça n’aide pas les personnes à « sortir du tunnel ». Il faut les soutenir, les encourager à parler, savoir que même si c’est dur là, ce n’est qu’une période et on finit toujours par avancer. Il faut continuer de se battre et s’accrocher à quelque chose qu’on aime pour s’en sortir. COURAGE !! Et surtout RESTER positif !!!

Art et patrimoine au service de la prévention du suicide.

Nous avons demandé à Caroline si des œuvres artistiques avaient pu l’aider à aller mieux dans les périodes de doute. Voici sa réponse :

« La première fois, j’avais six ans… de Isabelle Aubry.
Résumé de l’ouvrage : — En France, chaque année, des milliers d’enfants sont abusés sexuellement. Trois fois sur quatre par un membre de leur famille. Presque toujours, l’enfant et son entourage se taisent.
Victime de cette loi du silence qui a brisé sa vie, Isabelle Aubry raconte son calvaire.

Car moi aussi j’avais 6 ans… et je me suis retrouvée beaucoup à travers ce livre.
Après j’écoute beaucoup de Beyoncé car ça donne de la force et de la joie je trouve.

Merci beaucoup à Caroline pour ce témoignage !

Pourquoi sensibiliser ?

– Parce que la crise suicidaire peut être surmontée mais il faut demander de l’aide car elle peut être trop intense. Avez-vous pensé au plan de sécurité (élaboré par des soignants et mis à disposition) ? Lien

– Parce qu’avoir connu un proche qui s’est suicidé est perturbant et peut nous fragiliser, surtout si on traverse une période délicate (familialeprofessionnelle, économique, de santé). Avez-vous pensé à en parler ?
Lien pour le guide de gestion d’excès de stress en 8 langues de l’OMS / Lien ressources écoutes.